Souvenirs, souvenirs…

Merci à Charlotte pour ses merveilleux textes et pour la magnifique affiche créée pour notre fête du 02 juillet 2022. 

Revivez les étapes de la création de l’affiche et les anecdotes qui accompagnent chaque détail.

Notre fête se profile… Et je crois que le temps est venu de vous parler de notre affiche. Tout d’abord, il faut savoir que nous n’avons pas eu de courageux pour participer à notre concours. Donc il a fallu improviser.

Je me lance et me présente. Je suis Cha, scribe attitrée de la Banda et piccoliste à mes heures perdues. C’est souvent moi que vous avez au bout du fil ou de l’autre coté de l’écran. Mes « talents artistiques » se résument à des cours d’arts plastiques au collège, d’arts appliqués en lycée professionnel et de gribouillis faits sur les coins de mes pages de cours en IFSI…

Pour bien comprendre cette affiche, je dois vous raconter un peu la Banda Los Borrachos telle que je la connais depuis 20 ans maintenant (C’est le moment où je me sens un peu vieille…) . Je vais vous détailler chaque petit gribouillis parce que rien n’a été laissé au hasard. Il me tenait à coeur de faire quelque chose qui ressemble aux fins de soirées au comptoir du bar de notre salle, aux voix et aux personnages qui peuplent les anecdotes que l’on a bien trop entendues, quelque chose qui rappelle que même si certains ne sont plus là, leur amitié nous a été précieuse. 

Et finalement, cette affiche a reçu un joli accueil auprès des musiciens… Alors c’est parti… Mais comme toutes les bonnes choses se font désirer, vous en aurez un peu tous les jours.

Voici Libourne. Le créateur de la Banda (et nous en reparlerons) résumait cela ainsi :  

« Nichée au confluent de l’Isle et de la Dordogne, Libourne est une petite ville calme. Un important commerce de vin ( Bordeaux, Saint Emilion, Pomerol, Fronsac) donne à la cité une bonne aisance ainsi qu’une bonne mentalité bourgeoise.

Aussi, la naissance de la Banda Los Borrachos en 1976, ne souleva aucun enthousiasme. Quels étaient donc ces débiles qui allaient inonder les mornes artères de la cité de leur musique barbare? Seuls, dés le début, le club de rugby local et la municipalité pour son carnaval osèrent faire appel à ses services.

A toute chose malheur est bon. Cet accueil « mitigé » donna envie aux musiciens d’imposer, le label Banda et de se mettre sérieusement au travail. »

Mais voilà qu’il m’a pris l’envie de dessiner la Place Abel Surchamp telle une arène… Un élu avait pensé une fois faire un lâcher de vachette dans les rues… Nous avions ri mais notre Président a dû lui faire convenir que la chose était impossible..

Finalement, si l’on repense aux débuts de nos Borrachos, peut-être que c’était cela… Un joyeux troupeau de musiciens lâchés dans une arène quelque peu hostile il y a 45 +1 ans… finalement nous ne cohabitons pas si mal que cela !

Je suis sûre que beaucoup d’entre vous ont reconnu cette voiture… La 2CV qui arbore un joli autocollant des Borrachos. Vous pouvez parfois la croiser dans les rues de la ville.

Cette voiture est un symbole de la Banda. C’est celle de notre Président. D’ailleurs, l’avez-vous reconnu ? Cheveux fous au vent, moustache imposante, brandissant son saxophone et conduisant sans tenir le volant !

Je ne critiquerai pas sa voiture si iconique mais une fois où il m’emmenait jouer à Saint Pey de Castet ou Pujol, je ne sais plus exactement… nous avons dû garer la 2CV au pied de la colline car elle ne voulait pas monter… Et je pourrai aussi vous raconter qu’un jour, nous l’avions remplie de parpaings par le toit ouvrant… Elle traînait un peu au plancher !

Pierrot était appelé par son père « l’Homme à l’idée ». Il est notre Président, celui qui use ses hanches (vous le tenez le jeu de mots ?) depuis 45 + 1 ans en blanc et rouge presque tous les week-ends. D’ailleurs, cette formule mathématique qui orne nos affiches est un clin d’œil à son passé de prof !

Attardons nous sur les passagers de la 2CV… A l’arrière, vous pouvez reconnaître Fafa et son soubassophone… Devant, le tromboniste et le trompettiste pourraient être n’importe qui… regardez bien les personnages n’ont pas de visage… chacun pourrait s’y identifier…

Je ne peux pas vous parler de mon arrivée à la Banda sans vous parler de lui… ce grand… très grand saxophoniste qui est aussi notre Président Adjoint.

Allez ! Je suis certaine que beaucoup d’entre vous le connaissent ! C’est Vincent… Alias « Grand »… !

Et bien, nous nous sommes rencontrés dans ce qui pourrait s’apparenter à une autre vie. A l’époque, ma mère pensait que des chaussettes blanches, une jupette plissée bleue marine et un chemisier blanc faisaient leur plus bel effet sur une scène. J’avais 10 ans et je jouais de la flûte traversière à l’Harmonie de Libourne. Ma soeur Emilie, qui avait 5 ans de plus que moi, jouait à la clarinette à côté de Vincent dont l’âge faisait la médiane entre les nôtres.

Il faut le savoir : le garçon est un polyglotte musical. Véritable homme orchestre, il joue de la clarinette, du saxo, de la guitare, de l’accordéon et je crois que c’est déjà pas mal !

Les années avaient passé, faisant défiler partitions et notes de musique que nous réservions à des concerts de salle pour des spectateurs mélomanes… L’adolescence aussi était passée par là et nous aspirions tous, dans notre vie de jeunes adultes à un peu plus de réjouissances et festivités.

C’est alors que Vincent nous parla des Borrachos, ce groupe franchouillard où les répétitions se faisaient un verre de jaune au pied du pupitre et le rire au fond du gosier.

Ma soeur débarqua un mois avant mois. Pour ma part, la flûte traversière était un instrument trop « léger » pour se faire entendre dans le groupe et j’achetai, un jour de mai il y a 20 ans, dans une foire aux instruments, un piccolo sans trop savoir souffler dedans.

Après quelques jours à m’entraîner, je débarquai au milieu du cercle blanc et rouge dans le parc du Château Lescours. Alors que je massacrai dès le premier jour Amparito Roca, Mr Terral (Jeannot) me posa une main sur l’épaule et me dis ‘ C’est bien ! tu vas y arriver ! ». Je n’étais pas convaincue mais ce moment là marqua mon arrivée dans le groupe…

Je n’ai jamais pu le quitter…

Ceux qui connaissent bien l’histoire de la Banda savent que sans la Pro Patria, Los Borrachos n’aurait sans doute certainement jamais existé !

C’est grâce à l’appui de Simon Martorell, alors Président de la Pro Patria, une association qui regroupait fanfare et majorettes, que Mr Terral pu obtenir des moyens matériels.

Ce qui est amusant finalement, c’est que certains de mes aïeux sont passés par les rangs de la Pro Patria. Ma tante par exemple, ex miss Libourne si j’en crois la légende familiale, était chef des majorettes pendant un temps.

Autre légende ou pas… Mais un soir, l’un des musiciens me conta qu’un jour de discours du Maire, les musiciens arrivèrent costumés en majorettes… ou peut-être que dans sa tête, les évènements se sont confondus avec ces cavalcades où ils s’étaient travestis de bas résilles et bodys… Il existe à cela une magnifique photo (farfouillez dans nos albums… elle y est !) et je ne pouvais pas ne pas faire un petit clin d’œil à Eric: le bruit de son ténor que nous trouvions parfois trop sonore nous manque…

Le reconnaissez-vous ce petit trompettiste assis sur son tonneau ? Bien entendu que c’est un clin d’oeil à notre logo !

Il était inconcevable de ne pas le dessiner…. Qui est-il ? Je ne sais pas. Je serais même incapable de dire comment ce logo a été créé.

En revanche, des histoires de tonneaux, je peux vous en raconter.

Je me souviens d’un défilé à Aire sur l’Adour il y a de cela au moins une décennie. Il faisait chaud, et le défilé était long. Nous marchions dans la nuit, tentant de jouer malgré les confettis que les gens nous envoyaient en pleine face et ceux qui avaient envie de faire quelques pas de danse au milieu des musiciens.

Nous savions très bien qu’une fois terminé le défilé, nous irions retrouver notre chère Maryse au bar de son hôtel de la Paix.

Mais l’un de nos musiciens (Yves si je me souviens bien…) avait eu l’ingénieuse idée de ramener un petit tonneau sur roulettes… et bringuebalant cet attelage, il nous abreuvait à chaque pause de son rosé frais. Il nous avait sacrément motivés…

Ou peut-être que je pourrais vous parler de Petit Pierre, qui lors d’un périple à Pampelune pour la San Fermin, se prit brutalement pour un grand crooner et se mit à chanter, de sa plus belle voix, du Julio, debout sur un tonneau… Parfois, l’air du Pays, ça vous change un homme !

Autre symbole de la Banda… Notre banderole !

Elle en a vu des paysages, elle en a parcouru des kilomètres…

Pour la porter, nous avons toujours eu l’habitude d’emmener des amis. Christian, Dédé, Coco, Gaëlle, Nathalie, Sabrina, Florian, David, Jacu, Poussin…

Partir un week-end avec nous, ce n’est pas forcément de tout repos… Mais je pense qu’ils pourraient tous vous témoigner de la même chose. Il règne aux Borrachos une ambiance bon enfant et familiale.

Savez-vous qu’un jour, nous avons même eu un porteur australien ? Si si ! Il était en visite en France dans le cadre de ses études dans le domaine du vin. Je crois qu’il s’appelait Roy. Le pauvre garçon essayait d’apprendre toutes les subtilités de notre langue et histoire de passer un séjour sympathique, il comptait réinvestir quelques astuces de drague à la française.

C’était sans compter notre humour parfois potache pour lui permettre d’avancer dans sa maîtrise de la langue… Le mot « Banderole » avait été remplacé par un poétique « Banderoles de mes coui**** » et le mot « célibataire » par une version nettement moins classieuse de péripatéticienne.

Cela nous valut quelques approches auprès de la gente féminine assez spectaculaires et mémorables…

… Nous n’avons jamais été conviés au Pays des Kangourous…

Peut-être avez-vous profité aujourd’hui du soleil pour bronzer tranquillement sur votre transat sur la plage…

Combien de fois avons-nous entendu cette histoire de Gilbert se reposant sur un transat ? Je ne sais plus… Mais ce que je sais, c’est qu’il a fini le postérieur dans le sable parce que les anciens « jeunes » de la Banda avaient creusé sous les pieds du transat qui avait basculé… Il a souvent été celui à qui l’on fait des blagues, gentiment… mais qui aime bien châtie bien !

Des histoires avec Gilbert, il y en a plein. Et les oreilles qui trainent au comptoir après les repas et les répétitions en entendent toujours parler. Les récits sont ponctués de grands éclats de rire. Au final, même moi qui ne l’ai pas connu, j’ai l’impression qu’il plane toujours un peu de son âme…

Un jour, il est arrivé à l’harmonie où nous jouions, sa trompette vissée sur le côté de la lèvre et le sourire débordant des yeux. Il s’appelait Xavier et tout comme beaucoup de musiciens de l’Harmonie, il a suivi le mouvement pour rejoindre la Banda.

Autant vous dire que ces années avec lui ont été un plaisir pour tous les musiciens. Toujours gentil, toujours rieur, toujours insatisfait de ses entrées dans les morceaux….

Nous avions une tradition de baptême à chaque arrivée de nouveau musicien. Nous attendions notre périple à Aire sur-l’Adour et alors, l’un des musiciens du pupitre prenait en charge le « petit nouveau » à l’heure de l’apéro… Xavier avait créé la surprise ! Ayant crainte qu’on ne le fasse un peu trop boire, il avait anticipé et avait enchainé les verres tant et si bien qu’en à peine une heure, il était d’humeur plutôt joviale… Le lendemain fut rude, très rude… La pompe à essence de la station où nous prenions le bus pour notre départ fut elle aussi baptisée..

Quelques années plus tard, nous avons décidé qu’il était temps de donner un maillot jaune aux plus « endurants » d’entre nous… Nous y avons inscrit les noms de chaque vainqueur… dont le mien je dois bien l’avouer… Xavier aussi eu droit au sien et il fut pris en photo avec ce maillot, assis sur le bitume en pleine rue de Nîmes, souriant comme toujours.

Il fait partie tout comme Vincent de ceux qui m’ont vu grandir, devenir adulte, puis maman… D’ailleurs, nos filles ont le même prénom.

Il nous a quitté un jour de juin après un long combat. Son portrait veille sur nous dans notre salle Eric Pinon, autre trompettiste parti bien trop tôt lui aussi…

Le maillot jaune n’existe plus… il subit un jour un combat de catch qui le laissa en lambeaux puis se volatilisa avec l’un de nos portes-banderoles…

Il a décidé de quitter le groupe cette année parce que malheureusement, parfois, on a passé l’âge…

Hubert est arrivé il y a quelques années avec sa basse. Toujours le sourire, d’une discrétion à toute épreuve, fidèle à tous nos déplacements, il est vite devenu un « pilier » du groupe.

Je me souviens qu’il y a quelques années, avant que ce satané Covid passe par là, nous étions partis jouer tout un week-end je ne sais plus trop où, mais ce dont je me souviens, c’était que nous avions beaucoup ri. Et alors que nous étions en train de boire un verre, il s’est approché de moi, a trinqué avec moi et m’a dit « Quand je suis avec vous, j’en oublie mon âge ! »

Alors je lui ai répondu :  » Mon cher Hubert, c’est là toute la magie du groupe ! Individuellement, nous avons de 20 à 80 ans… mais lorsque nous sommes tous ensemble, nous avons tous 18 ans. Plus de barrière, plus d’écart d’âge… Nous sommes de grands ados. » Il avait ri en approuvant, l’œil pétillant.

Il m’a succédé au poste d’archiviste, et il a fait un travail fou. Il nous a réécrit des partitions, il a trié tout le bazar laissé par chefs et musiciens…

Ces derniers mois, sa mémoire a eu tendance à s’envoler, comme des partitions qui voleraient dans une bourrasque de vent. Mais lors du dernier repas où il est venu nous rendre visite, il m’a dit  » Tu vois, je ne sais plus tous vos prénoms mais ce que je sais, c’est que je suis bien ici. »

Voilà ce qui fait que nous aimons être ensemble… oublier un peu qui nous sommes, se sentir bien, et donner de la joie aux autres…

Si aux Borrachos, il y a des figures, il faut savoir que lui en fait partie.

Comme bon nombre de musiciens, il s’appelle Stéphane (Ouais, nous en avons un sacré registre…). Je l’ai connu au Sax Ténor, puis à la Clarinette. Il est notre trésorier.

Je vous ai dit que la Banda était une grande histoire de famille ? Regardez, moi je joue avec ma soeur. Nous avons aussi 3 frères que nous appelons gentiment les Roumains : 2 sont trompettistes, le 3ème est tubiste. Leur mère joue de la Grosse Caisse et leur père, qui n’est pas musicien, est devenu notre vendeur de CD officiel.

Et bien, Stéphane joue avec son frère Fabrice… ( Mais si ! Suivez un peu ! Le mec dans la 2CV avec son soubassophone.)

Et bien, chose très amusante… Lorsque je suis arrivée à la Banda, lors des repas, il venait avec son épouse et ses deux fils dont le plus jeune à l’époque devait avoir 5 ans tout au plus. Depuis 4 ans maintenant, il joue avec nous de la basse. Les générations se suivent aussi à la Banda !

PS : si vous voulez vous amuser avec Stéphane, sachez qu’il suffit qu’il entende un peu de Dalida en ayant bu quelques verres, pour qu’il se mette à chanter ! Ceux qui ont connu les fins de contrat au Carré Rose doivent s’en souvenir !

J’ai fait la connaissance de Nicolas peu de temps après mon arrivée aux Borrachos. J’avais troqué l’harmonie de Libourne contre celle de Castillon-la-Bataille où j’usais les tampons de ma flûte traversière. Lui jouait là-bas depuis un moment. De fil en aiguille, il a suivi le mouvement et nous a à son tour rejoint.

Quelques années plus tard, Bruno, un de nos trombonistes et frère d’Eric, étant revenu dans la région, nous proposa de nous donner quelques cours de trombone à coulisse. Pour ma part, l’écart était grand depuis le piccolo. Pour Nicolas, ce fut quelque chose de plus naturel puisqu’il jouait déjà du flugabone. Ainsi, nous nous retrouvions régulièrement dans notre salle de répétition, avec les autres bassistes et soubassophonistes. Coco, une copine qui officiait en tant que porte-banderole, fut aussi mise au défi d’apprendre la basse. Nous entendions des « Coco, fais nous un Do ! » … suivi d’un gros Pouet plein de volonté !

Nous répétions ensemble puis, comme nous ne pouvions pas nous quitter comme ça, nous nous attablions le temps d’un repas.

Ces instants de partage ensemble étaient toujours si agréables, empreints de rires et d’une franche camaraderie.

Et puis… parfois, certains évènements font que nous devons mettre un terme à cela, toujours à contre-coeur…

Un jour, Bruno nous a quitté brutalement. Et nous ne savions pas, la veille, que cette répétition, ce repas et tous ces projets seraient les derniers que nous partagerions avec lui.

Nicolas joue toujours du trombone à coulisse et je dois dire que dès que je l’entends jouer, j’ai toujours une pensée pour celui que nous appelions « Prof ».

Ce qui l’ont connu il y a de cela quelques années auront reconnu sa moustache… Jojo est l’un de nos clarinettistes. Fidèle au poste depuis toujours, il a la particularité de jouer toujours trop haut lorsque le chef veut l’accorder…

Il y a maintenant une dizaine d’années, nous étions partis jouer aux fêtes de Nîmes si nos souvenirs sont bons. Nous étions dans un bar et nous avons vu notre Jojo revenir totalement travesti : manteau de fourrure, casquette blanche sur la tête, lunettes de soleil au bout du nez… Ce soir-là, il a fini avec les filles de la Banda sur les tonneaux (Tiens… encore une histoire de tonneaux…)… certains ont moins bien tenu que d’autres ! Le sol s’en souvient encore !

Ce déguisement n’était pas son premier coup d’essai : nous l’avions vu en vamp une autre fois, en aveugle avec sa canne blanche un autre jour…

Jojo fait partie de ces personnes qui imposent le respect mais sont toujours partants pour rire. Avec ses grimaces, ses imitations, sa répartie et ses pas de danse endiablés, il nous fait très souvent rire. Au delà de tout cela, il est un excellent ami, de celui qui vous tend la main lorsque vous en avez besoin.

Beaucoup ne le savent pas, mais un des premiers étés où je jouais aux Borrachos, je suis allée à la plage avec lui, Ernest et Petit Pierre pour ceux qui les connaissent. Ce fut une sacrée virée où les gens nous regardaient bizarrement… le fameux choc des générations certainement… mais comme je l’ai déjà dit, aux Borrachos, l’amitié n’a pas d’âge.

Richard Branson…

Darricau-Couenne…

Petit Pierre…

Papa…

Sa Grandeur…

Presque aussi haut que sa grosse caisse, il est affublé de tant de surnoms…

Pierre fait partie de ces personnes discrètes de la banda, qui ont toujours le sourire… Un jour avec la moustache, un jour sans… un jour chasseur, un jour moine… Inconstamment fidèle à lui-même.

En revanche, ce n’est pas lui qui a joué avec un os. Mais cette histoire, je ne pouvais pas ne pas vous la raconter.

Un jour de déplacement je ne sais plus trop où, à leur arrivée sur place, ils se rendent compte que leur joueur de grosse caisse a oublié la mailloche. Alors personne ne se démonte : ils vont voir le boucher du coin et lui demandent un os. Et c’est comme cela que durant tout un week-end, la grosse caisse fut frappée avec un fémur de bœuf !

D’autres fois, certains frapperont des cailloux en guise de cymbales… d’autres encore joueront du cintre. L’essentiel est de faire de la musique, non ?

Aujourd’hui, je voudrais vous ramener quelques années en arrière, aux fêtes de Mont-de-Marsan.

Nous avions peu dormi dans la nuit, et il avait fallu assurer le défilé. Par chance, au bout de deux longs et pénibles tours sous une chaleur étouffante, nous avions eu l’autorisation de quitter le défilé… ce qui tombait plutôt bien puisque le soleil au zénith annonçait l’heure de l’apéro. Nous étions au bar en face des Halles. Nous rigolions des exploits de Dédé, notre porte-banderole, qui avait décidé de faire le service. Tout à coup, en nous retournant pour admirer le défilé, nous voyons arriver en tête de cortège, bob sur la tête et lunettes de soleil au bout du nez, pédalant sur un vélo qu’il avait trouvé je ne sais où, notre Ernest. Il devançait tout le monde, il passa et disparut.

Alors vous remarquerez que sur ce vélo, ce n’est pas Ernest que j’ai dessiné mais Jean-Claude. Jean-Claude était l’un de nos saxophonistes. Parfois, mon cerveau me joue des tours et je ne pouvais pas ne pas le dessiner sur ce vélo… sans doute parce que dans ma caboche, facteur et vélo sont associés. Voyez-vous, facteur, c’était son métier.

Il nous a quitté mais je garde le souvenir de ses cheveux longs gominés, de son sourire et de sa gentillesse…

Un jour où nous jouions dans le Gers le week-end de mon anniversaire, je lui avais raconté un souvenir de mon enfance : le lendemain, il était revenu avec une part de croustade, gâteau sur lequel je soufflais mes bougies lorsque j’étais gamine…

Vous le reconnaissez ? Avec ses bretelles en toutes saisons, c’est notre Didier.

Saxophoniste, nous le charrions souvent sur les sons émis par son biniou. Parfois, en pleine répétition, on entend un ronflement… C’est Didier.

On entend un bâillement. C’est Didier.

On entend…

Parfois, en plein défilé, nous le perdons. Tenez ! une fois, nous l’avions retrouvé dans une boutique qui avait été privatisée pour l’occasion. Il se découpait tranquillement du jambon de pays et trinquait avec les gens présents. Nous avons fini avec eux… ce fut l’occasion d’un concert privé.

Didier aime la bonne bouffe et la bonne boisson ! D’ailleurs, il nous avait instauré une tradition lorsque nous allions à Aire-sur-l’Adour… Une tradition culturelle ! A chaque déplacement, nous nous arrêtions dans un domaine pour une petite dégustation d’armagnac.

A notre grand regret, nous ne sommes pas retournés à Aire depuis un moment… Mais goûter l’armagnac en fin de nos repas est resté…

Ce personnage est double… J’ai essayé de gribouiller un joueur de caisse claire proche de deux de nos percussionnistes.

Certains y verront donc Christian… Un excellent batteur, toujours très discret. Il ne joue plus avec nous car il est devenu le Chum d’une super fille à l’accent québecois… et tant mieux pour lui.

J’ai appris à connaître Christian lors de l’écriture du livre retraçant l’histoire du groupe. Il a un coup de crayon fascinant. Il a caricaturé le groupe et certains musiciens plus en détail. Et je me souviens qu’il m’avait remis le portrait de Mr Terral en s’excusant presque « Lui, il est difficile de le caricaturer… ». Et je le comprenais bien : Mr Terral a toujours imposé tant de respect ! Plus tard, il nous a fait la jacquette haute en couleurs du CD « Et voilà l’travail ! ».

Dans un autre gabarit, certains y verront Patrick. Il est entré au sein de la banda à une époque où il entrait dans un pantalon taille 38 m’a-t-il dit récemment…

Il a été le premier musicien du groupe dont j’ai fait la connaissance à mon arrivée. Puis il m’a présenté Eric R. … qui a joué le rôle de « parrain » pour moi pour mon baptême aux Borrachos (… vu que ma collègue au piccolo de l’époque, étant mineure, était exemptée de bars…).

Il y a quelques années, à Aire sur l’Adour, il est arrivé dans notre chambre au petit matin accompagné de Fabrice et nous a réveillées en tentant de nous brosser les dents avec un balai brosse. Le réveil avait été brutal !

La course Landaise… Tous ceux qui ne connaissent pas se doivent de venir voir. Aucun animal n’est maltraité, nous vous le promettons. Cela relève plus du sport et du spectacle. Les jeux qui terminent la course rappelleront aux plus de 30 ans les jeux d’Interville… Zitrone en moins ceci dit !

Et Guillaume, de la Ganaderia Dussau, est un vieil ami maintenant des Borrachos. C’est avec tellement de plaisir que nous l’accueillons pour notre fête ! Bien entendu, nous vous jouerons la Marche Cazérienne, le classique des arènes…

D’ailleurs… il n’y a pas que les raseteurs, écarteurs et autres sauteurs qui aiment défiler au pas cadencé sur cet air.

Ceux qui étaient à notre fête pour les 30 ans doivent se souvenir d’un formidable défilé de notre Président Pierre-Jean et de son acolyte Ernest. Tous deux « vétérans » du groupe, entendant la musique au moment où on les appelle sur scène, arrivent côte à côte, saluant leur public tels deux politiques saluant leurs électeurs et provoquant un rire général dans la salle des fêtes de Libourne !

Ce défilé a été immortalisé…

Nous arrivons presque à la fin… et je me devais de vous parler de nous ! Les « filles » de la Banda.

Lorsque je suis arrivée il y a 20 ans, nous étions 3 : Christine aux cymbales, Emilie à la Clarinette et moi donc… Puis Solène est arrivée.

Un jour, quelques musiciens nous ont mis au défit de venir en jupe… et c’est ce que nous avons fait. Nous sommes arrivées à la fête avec les jambes à l’air et avons pris une photo de ce moment là !

Les années ont passé…

Puis Véro, qui avait longtemps joué dans le groupe, est revenue à la Banda mais elle avait troqué ses cymbales contre un saxophone.

Mylie est venue doubler les rangs du piccolo. Enfin je n’étais plus seule…

Puis ce fut le tour d’Anne, ramenée de l’Harmonie Coutrillonne par quelques musiciens jouant sur les deux formations.

Jocelyne, qui suivait ses fils lors des manifestations, a décidé que la retraite était une chouette période pour apprendre la grosse caisse : et c’est ainsi qu’elle a intégré les rangs.

Enfin, il y a 2 ans, le téléphone de la banda a sonné. La voix au bout du fil m’a dit  » Je m’appelle Paola et je débute le saxo. Mais j’aimerais bien venir jouer avec vous. ». Je lui ai parlé du groupe, que c’était une famille de tous âges, mais qu’il y avait une bonne ambiance. Qu’il fallait aimer blaguer tout de même, et qu’on ne pouvait pas toujours compter sur le bon goût de notre humour. Mais que personnellement, j’adorais cette banda. Et c’est ainsi qu’elle nous supporte avec bonne humeur depuis 2 ans !

Je vous parle de ces filles-là, car ce sont elles que vous risquez de croiser lors de la fête…

Tant d’autres sont passées dans nos rangs et on dû arrêter, par choix ou par nécessité… peu importe ! Elles sont moins présentes dans les anecdotes de comptoir mais elles ont fait partie intégrante de l’histoire du groupe…

Jacqueline, Pauline, Kate, Céline, Marie, Sophie, Marianne, Françoise, Béatrice, Delphine, Anne… et sans doute d’autres encore dont les noms m’ont échappé !

« Mais voyons Cha ! Tu as oublié de parler de ce musicien là en bas… c’est qui ? Yoann ? »

Oui.. peut-être que c’est Yoann, arrivé à la trompette mais qui avait viré de bord pour la basse, ce même Yoann qui un jour nous a improvisé une chorégraphie sur du Dalida dans les rues de Aire…

Ou peut-être pas… parce qu’on ne peut pas dire qu’il lui ressemble. Il est là, au milieu, basse au bec, sans visage.

Je crois que comme les passagers de la 2CV de Pierrot, il est un musicien parmi tant d’autres… Tellement sont passés dans nos rangs… des jeunes, des plus vieux, des drôles, des philosophes, des fêtards et des sérieux, des fauchés, des étudiants, des diplômés, des bons musiciens… et des moins bons…

Cette banda n’aurait jamais existée sans tous ces visages et couleurs.

Chacun, peu importe le temps où il est resté, peu importe que l’on parle encore de ses exploits ou non, a permis un jour de faire vivre la Banda.

Chacun est aussi reparti avec des histoires en tête et de l’amitié plein le coeur.

D’ailleurs… Si vous venez à notre fête, vous verrez quelques anciens reprendre du service ! N’est-ce pas La Calmeur ?

Quoi ? Vous ne le connaîssez-pas ? Mais si ! La Calmeur, c’est Philippe, l’un de nos abonnés les plus actif. Il est riche de jolies anecdotes et il ne s’est pas passé une seule journée sans qu’il ne commente les publications, pour mon plus grand bonheur, moi qui n’ai jamais eu la chance de jouer avec lui… Par contre, il y a quelques années, j’ai filmé pour lui un petit morceau et le lui ai dédicacé le jour de son anniversaire… Lui et moi avons un point commun : nous aimons notre banda !

Au printemps 2011, alors que mon ventre se déformait sous les premiers coups de pieds d’une petite Léane qui viendrait, dix ans plus tard, avec tellement d’envie et de fierté, taper la cloche aux Borrachos de temps à autre, Mr Terral et sa femme, que tout le monde appelait Poupette, nous avaient reçus chez eux. Nous lui avions exposé notre envie de faire un livre retraçant l’histoire de la Banda. Il m’avait alors tendu une liasse de feuilles manuscrites en me disant  » J’avais commencé ça mais je n’ai jamais fini… »

Je me souviens avoir relu ces lignes non sans avoir les yeux quelques peu humides… les hormones, c’est fou comme ça vous travaille !

Mr Terral n’est plus là. Mais ces écrits sont le témoin de toute cette aventure !

« Et puis il y a tous les autres et ceux-là, fort heureusement, sont encore là. Ils continuent à sillonner le pays, portant avec eux leur musique vive et pétillante, leur allégresse. Ils sont, dans un monde qui devient gris et triste, dans un monde où l’individualisme et l’égoïsme triomphent, le dernier bastion de l’insouciance et de la gaieté. Certains ont vieilli, ont blanchi, mais conservent et conserveront toujours dans leurs yeux cet éclat de malice qui prouve bien les moments heureux qu’ils ont vécus. Qui peut oublier en effet notre petit trompettiste Dupart enveloppé par les prévenances démonstratives d’un grand gendarme complètement « bourré » à l’entrée des arènes d’Aire sur Adour ? Qui peut oublier cette hallucinante séance de hula hop exécutée par le grand Ernesto vers les trois heures du matin avec un tube fluorescent dans les ténèbres d’un gymnase qui à Dieppe nous servait de dortoir ? Qui peut oublier cette corrida reconstituée dans un grand café de Nîmes remplissant le bar de clients hilares ?

Il faisait nuit à Schwandorf et la fête était chaude. Tout le monde se souvient de la prise d’assaut de la grande fontaine située sur la place centrale de la ville. Là, les pieds dans l’eau, sous les embruns des jets d’eau, les Borrachos ont joué une heure durant, devant une foule de Bavarois d’abord médusée puis déchaînée.

« Touche ! … Non, pas touche ! ». C’était à Keynsham. Notre séducteur Joël était poursuivi par une jolie blonde qui voulait tester la douceur de ses mains. Mais le mari veillait, le tout bien sûr sous le regard et les commentaires égrillards de la troupe. Seul notre cymbalier Miguel, menotté à une grille, semblait assez inquiet sur son avenir. En effet, le policier qui nous escortait, cédant à la demande de Miguel, l’avait attaché et répondant à notre invitation, l’avait abandonné pour participer au vin d’honneur offert par la municipalité.

L’interminable défilé de la fête des vendanges à Logroño venait de s’achever. Assoiffés, les musiciens de la Banda s’étaient précipités dans la bodega de la Peña La Alegria. Ils y furent accueillis par le célèbre torero landais, l’as des as de l’époque Ramuntcho. Il avait fait très chaud et Ramuntcho avait dû lutter opiniâtrement contre la déshydratation. Là, au milieu d’Espagnols tout d’abord ébahis, éclata la célèbre marche Cazérienne, hymne de la course landaise, et un défilé de toreros landais, conduits par Ramuntcho, traversa la bodega. On se serait presque cru dans le sein de la Mecque Landaise de Pomarez. « 

Des anecdotes… il y en aurait tellement…

Voilà… Chacun de mes petits gribouillis vous a raconté un peu des Borrachos… Bien sûr que j’aurais pu vous en raconter encore…

J’aurais pu vous parler du sens de l’orientation de notre Président qui nous avait obligé à faire la tournée des bars de Mont-de Marsan et de ce réveil à l’arrosage automatique sur le stade…

De la baignade de notre chef Jérôme dans un canot de sauvetage aux fêtes de Bouillargues… des balades sur les bottes de foins, des cartons de Get pour les filles, des danses sur le comptoir immense de la bodega…

De la partie de cartes de Dédé au Cercle des Travailleurs de Captieux…

De ce balcon où nous avions joué à 30 musiciens…

Des arbres à Ricard de la Palombière…

De l’enregistrement du CD « Tempête » en 2009, des Get-Prévost et de « Nathalie »…

De nos voyages au ski, à Bruxelles, à Sottrum, à Barcelone…

De la côte de Aire dont la remontée était si dure qu’une fois, un cabriolet dont le coffre avait été transformé en bar, nous attendait à l’arrivée…

Des afters dans le motel aux poules de Nîmes…

Des sonneries au mort en plein milieu des ruelles désertes et calmes dans la nuit…

J’aurais pu vous parler aussi des gens que nous avons croisé : Benoît, Patrick, Yves, Maxime, Antoinette et Alex, Maryse, le Postier…

J’aurais pu vous parler de nos chauffeurs de bus : « Schumacher » (qui osait le virage à 360° sur l’Avenue du Général de Gaulle à Libourne », Olivier…

J’aurais pu vous parler de nos familles, nos conjoints qui supportent souvent nos départs pour plusieurs jours, ceux qui nous ont vu rentrer parfois guillerets… trop guillerets…

J’aurais pu vous parler de ces éléments de la Banda qui ne sont pas musiciens mais qui répondent toujours présent pour nous aider : Monique, Marie-Ange, Florence, Michel…

Regardez-nous attentivement ! N’avons-nous pas l’air tous un peu follement heureux dans cette arène libournaise ? Un défilé désordonné qui nous ressemble, sous l’œil attendri de Jeannot. Tout le monde est là…

Je ne sais ce qu’il adviendra de la Banda mais lorsque je suis au comptoir de la salle, en regardant les portraits qui veillent sur nous, je me plais à penser que peut-être qu’il existe un monde qui ressemble à cette salle où il faut passer sous un petit clairon estampillé « Pro Patria » pour pouvoir rejoindre son pupitre. On entendrait les gammes sonores d’un Eric P. en train de chauffer son saxophone ténor. Derrière, Bruno et Eric R. joueraient de concert de la coulisse, tandis que Paul, la grosse caisse en bandoulière et la mailloche dans le prolongement du bras irait rejoindre sa chaise.

Jean-Claude, assis au comptoir, un pied sur le barreau, l’autre jambe tendue de toute sa hauteur, parlerait avec Yves, qui les yeux rieurs et les joues rouges, serait obligé de lever la tête pour le regarder. Eric P. se tiendrait debout sous cette même plaque qui orne le mur et porte son nom. Derrière le comptoir, Xavier tirerait des bières et ferait le service. Gilbert, Eric M., Jean-Louis, se mêleraient aux discussions. Pépé Funfstuck, assis dans un coin, feutre sur la tête, appellerait tout le monde pour répéter. Tout le monde arriverait petit à petit… Mr Terral nous saluerait en serrant fermement et amicalement notre épaule. Nous serions tous réunis… Ceux qui ne sont plus là, ceux qui jouent encore dans le groupe, ceux qui ont dû partir… tous les âges seraient mélangés…

Plus de 100 musiciens ensemble… La musique serait celle de la fête ! Autour de nous, les gens danseraient sur Nerva ou feraient un immense Paquito en balançant les bras. On trinquerait sans raison aucune. Seulement pour le plaisir de partager ensemble tout ce qui fait que notre Banda Los Borrachos est si unique !

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